Akiko Hoshina, « Liturgie d’argile »

 

Akiko Hoshina est une artiste japonaise utilisant la céramique ou autre matériau se transformant avec l’eau, le soleil et le feu. Dans son travail, le processus de métamorphose de la terre est essentiel.

Pour la Galerie Saint-Séverin, elle a souhaité présenter un projet contextuel. Elle a d’abord orienté ses recherches sur les objets rituels puis s’est focalisée sur les ornements liturgiques : deux étoles – l’ornement principal du prêtre – ont été acquises. En effet, la céramiste s’intéresse particulièrement aux objets et vêtements traditionnels ou symboliques qu’elle transforme pour ses œuvres.

 

Fidèle à son procédé de recouvrement comme pour les séries « Des Funérailles » et « Monolithes », Akiko Hoshina a recouvert – en partie seulement – d’argile blanche les deux parures et le sol de la galerie : la terre a été humidifiée et roulée avec la paume des mains, puis répartie en petits boudins superposés selon la technique du colombin. Elle aime justement la malléabilité de la terre, sa souplesse. Autre caractéristique, elle marque souvent ses créations de ses empreintes de doigts, la trace de son corps est donc présente : « Le tactile est indissociable de son geste dans la pratique de la terre »[1] .

En revanche ici, pas de cuisson, le matériau va sécher naturellement, durcir ; en conséquence l’installation va évoluer, évocation du temps qui passe. La terre symbolise d’ailleurs pour l’artiste le cycle même de la vie : elle est humide donc vivante, puis sèche donc meurt. De plus, elle peut toujours être réutilisée, retravaillée et de ce fait, la terre renaît toujours.

 

Cette renaissance peut également se lire dans son installation. En effet, la petite étole est posée, étendue sur le sol derrière la vitrine ; cette position allongée évoque la mort, le corps absent, et le violet aussi est la couleur portée pendant la période du Carême, du Jeûne. Au contraire, la grande écharpe est présentée par la céramiste suspendue, incarnant le corps présent ; la position debout représente la vie et les couleurs blanche ou or sont portées au moment de la fête de Pâques, soit la célébration de la résurrection du Christ. En somme, cette exposition rend compte d’une évolution cyclique de la matière, de la nature, de la vie. 

 

Akiko Hoshina mélange les traditions, les savoir-faire, les techniques et les sources d’inspirations dans ses œuvres et toujours avec respect. Elle mêle ici encore une technique primitive sur des ornements liturgiques. D’ailleurs, l’artiste, par son geste répétitif, adopte une attitude proche de la méditation, du recueillement, du rite sacré, voire de la prière. Sa liturgie à elle, c’est l’argile.

 

Géraldine Dufournet

 


[1] Yves Sabourin, …, 2010 (catalogue d’exposition).